ll - LES POINTS

1 – LE POINT DE BASE OU POINT DE TOILE :

C’est la base de tout travail en tissage. C’est le point le plus simple. tissage - point de toile

Il consiste simplement à passer des fils de trame horizontaux entre les deux nappes de la chaîne, en inversant ces deux nappes après chacune des duites ou passées de fils.

C’est la base de tout travail, même pour un tapis à points noués : on intercale en effet toujours, pour la tenue et la solidité du tapis, une ou plusieurs duites entre les rangées de nœuds, le nombre en variant selon l’épaisseur ou l’effet recherchés.

Voici comment Tamo passait son fil de trame :

Elle prenait le fil dans la main gauche, entre l’index et le majeur. Le roseau « c » étant en position haute (et si nécessaire elle pouvait augmenter un peu l’écart entre les nappes en appuyant légèrement avec le dos de la main droite sur la chaîne au-dessus du roseau) puis elle enfilait sa main gauche entre les deux nappes de fils ; sa main droite, pénétrant à quelque distance de là entre les deux nappes, venait à la rencontre de la main gauche et reprenait le fil, également entre l’index et le majeur et ainsi de suite d’une lisière à l’autre. Elle ne cherchait pas à tendre le fil de trame mais le laissait plutôt lâche donc formant une courbe entre les deux nappes

tissage - point

De quelques coups frappés avec l’index, elle rapprochait alors le fil de la partie tissée en commençant toujours par le milieu puis par le bord au niveau des lisières.

tissage - point 1

Puis elle faisait de même de place en place, régulièrement, avant de tasser tout le rang à coups secs de medgha.

tissage maroc

Tamo baissait alors le roseau  "c" pour intervertir les nappes de chaîne au niveau de la trame en cours (au besoin pour augmenter l’écart, elle tirait un peu le roseau vers elle) ; puis elle prenait le fil de la main droite, entre index et majeur, pour le glisser dans l’écartement des nappes et elle le tirait du côté opposé avec la main gauche en le laissant lâche comme précédemment. Et ainsi de suite…

Le roseau doit toujours être en position haute pour la première passée, en position basse pour la suivante.

Pour le tissage d’un tapis qui va être très tassé, il n’est pas nécessaire que la duite soit d’un seul tenant. On peut faire une passée avec plusieurs bouts de fil différents (c’est d’ailleurs ce qui se passe quand il comporte des motifs) : il suffit de faire chevaucher légèrement les extrémités avec celles des fil suivants et précédents et de faire ressortir les extrémités des brins entre les fils de chaîne. Quand le tapis sera terminé, on coupera au ras du tissage tout ce qui dépasse.

tissage - point 2

Pour des couvertures dont le tissage est plus lâche, on prendra la précaution de raccorder discrètement les fils entre eux.

2 – LES POINTS NOUES :

Les tisseuses marocaines utilisent un nœud particulier que j’appelle « nœud marocain » faute d’en savoir le nom exact. Le nœud persan n’est utilisé en principe que pour les tapis de Rabat et pour certains usages particuliers comme la fixation de paillettes en cours de tissages, pour des tentures par exemple.

Quelque soit le système employé pour nouer les brins de laine, les rangées de nœuds sont toujours séparées les unes des autres par un ou plusieurs fils de trame, le nombre en variant selon l’effet recherché. En augmentant le nombre des fils de trame, on obtient des tapis plus légers mais moins solides. C’est le cas des tapis de Tazenaht qui intercalent 3, 4 ou plus de duites entre les rangs de points noués. Ils sont d’ailleurs, en fait, plus des tentures que des tapis de sol et compensent le manque de solidité par le charme des dessins et des coloris.

Si l’on choisit de faire un tapis épais et résistant, on séparera les rangées de nœuds par une ou deux duites seulement.

Cependant il est à noter que pour les tapis de haute laine où les brins sont conservés particulièrement longs et dont une partie du charme vient de l’aspect « couché » de ces brins, il faut au contraire intercaler plus de duites.

Il faut éviter de trop serrer les nœuds lors de leur exécution afin de ne pas rapprocher les fils de chaîne entre eux et respecter leur écartement.

Chaque fois qu’une rangée de nœuds est terminée, on la tasse à coups de medgha avant de passer le fil de trame qui lui fait suite. Il ne faut surtout pas avoir peur de tasser fortement.

tissage - outils tissage marocain

l'endroit du tapis noué est face à la tisseuse

a – Le nœud marocain :

Il est utilisé pour la plupart des tapis marocains et en particulier pour les tapis de haute laine. Le brin de laine passe derrière 2 fils de chaîne, revient devant eux, repasse encore derrière puis dans la boucle qu’il a ainsi formée. La tisseuse tire légèrement sur le nœud, sans resserrer les fils de chaîne et tranche l’excès de laine avec son couteau.

Les marocaines qui ont appris encore fillettes à réaliser ce nœud exécutent ce travail avec une étonnante dextérité. Munies d’un peloton de fil elles font un nœud puis d’un coup sec de leur couteau tranchent les brins à la longueur voulue, plutôt trop longue que trop courte : elles ne cherchent pas ici la précision mais la rapidité d’exécution car la longueur des brins de laine sera par la suite affinée quand le tapis sera terminé, décroché du métier et posé sur le sol.

  tissage - noeud marocain

b – Le nœud persan :

tissage - noeud persan  

C’est celui qui est couramment utilisé pour la confection des franges, la fixation des paillettes sur les tentures en cours de leur tissage et pour la fabrication des tapis de Rabat, car étant plus plat et plus serré il permet des dessins plus précis.

La tisseuse passe le brin de laine entre deux fils de chaîne, le fait tourner autour de celui de gauche, passer devant les deux fils de chaîne puis à droite et derrière celui de droite avant de le faire ressortir vers elle entre les deux fils de chaîne, sous la boucle ainsi réalisée et sans serrer cette dernière. Elle tranche alors les deux brins de laine avec son couteau.

c – Nœud de fixation des paillettes (mozôn:

Celles-ci sont couramment utilisées au Maroc, notamment pour les tentures murales ("hanbel"). Elles sont fixées en cours du tissage à l’aide du nœud persan.

  tissage - noeud fixation
tissage - noeud fixation 2  

On prépare les paillettes à l’avance avec un fil suffisamment long pour pouvoir les insérer dans le tissage. Le fil doit être solide pour ne pas être cisaillé à la longue par la paillette aussi préfèrera-t-on du coton, la laine étant trop fragile pour cet usage.

Après fixation de la paillette sur l’ouvrage en cours, on coupe l’excès de fil.